Bi Polar
Dans le cadre de sa collaboration avec le Cercle Artistique de Luxembourg, la galerie Schlassgoart a le plaisir de présenter les œuvres de Sandra Lieners et de Roland Schauls, récipiendaires du Prix Pierre Werner 2018. Cette exposition bicéphale introduit un dialogue entre deux artistes aux univers différents.
Doté d’un vocabulaire pictural singulier, Roland Schauls jouit d’une réputation bien établie de peintre figuratif. Ses œuvres se trouvent dans des collections publiques et privées au Luxembourg et à l’étranger. Son monde imaginaire est émaillé de références à l’histoire de l’art du Grand-Duché notamment à Jospeh Kutter sa figure de proue. Son travail haut en couleurs, jubilatoire et insolent, regorge de citations et de références picturales aux grands maîtres. Ses toiles nous apparaissent alors comme des réceptacles mémoriels où la leçon des anciens est rendue pérenne. Roland Schauls fait aussi de sa peinture, un journal intime visuel où il fixe, par la chorégraphie du pinceau, sa vision du monde, sa conception de la vie qu’il théâtralise en une somptueuse et parfois grinçante comédie humaine.
Les compositions de l’artiste dont il se fait l’habile scénographe, sont de véritables capriccio ou scherzo visuels qui jouent avec la perception du spectateur et l’invitent à s’interroger sur son passé et son présent. Elles sont exécutées en un geste au mouvement enjoué et libre, mais dont la spontanéité est paradoxalement le fruit d’une intense réflexion préparatoire. Elles sont baroquisantes par la pléthore d’objets qui les émaillent et par leur portée décorative, complètement assumée par l’artiste.
Côté plastique, il y a les aplats, le touche et les formes qui s’épousent, le dessin et le graphisme qui s’unissent à des envolées gestuelles, des découpes et des lignes qui imposent leur cadence au rythme de la composition et surtout cette acrylique au rendu de tempéra qui rehausse les œuvres d’une texture sensuelle et tactile. Le peintre recherche de surcroît l’harmonie parfaite entre l’iconographie et la couleur, nous leurre avec des perspectives volontaires faussées, avec ses intérieurs en extérieur et les décors qui ne font qu’un avec le paysage environnant.
Le peintre évite la naturalisme, rechigne à l’illusionnisme, se place plutôt dans la suggestion et le pastiche et nous livre un style qui lui est propre, farouchement identitaire, un brin ironique, parfois mélancolique mais non spleenien bien que l’artiste effleure une symbolique une once mortifère.
Quant à la jeune Sandra Lieners (1990), formée à la prestigieuse Académie des Beaux-Arts de Vienne et à l’Accademia di Belle Arti de Florence, elle peut se targuer, du haut de ses vingt-neufs ans, d’un début de carrière plus que prometteur. Son impressionnant curriculum-vitae égraine les nombreuses expositions personnelles et collectives auxquelles elle a participé ainsi que les prix remarquables qui sont venus auréoler son travail studieux. Dans sa production, Sandra Lieners intègre les aspects les plus récents d’une figuration qui se situe après certaines tendances du post-modernisme. Ses clins d’œil à l’art de Michel Majerus l’inscrivent dans cette continuité d’un réalisme puisant ses ressources thématiques et ses processus techniques dans les thésaurus d’images que propagent l’internet et le scène artistique internationale.
De plus, l’artiste se nourrit de ses nombreux voyages et ses œuvres, toujours réalisées en séries, sont le fruit d’impressions ressenties, d’instantanés saisis dans les villes et les pays qu’elle parcourt. Sandra, bien qu’observatrice enthousiaste du monde qui l’entoure, ne travaille pourtant pas sur le vif. Elle prend des photographies, les imprime, les scrute sous toutes les coutures, cherche les juxtapositions les plus inspirantes, joue de confrontations et illustre sa toile de différentes facettes. Elle structure, architecture ses compositions, fait entrer en symbiose l’abstraction et la figuration, entraîne le regard du spectateurs “au delà de la surface”, l’invite à s’abîmer dans les diverses strates de ses toiles. L’une des caractéristiques de la peinture de l’artiste est de poser des questions à l’observateur plutôt que de donner des réponses fixes. Les cadrages particuliers montrent seulement des fragments de scènes qui titillent notre imagination, induisent le concept de fraction d’éléments, d’instants et font ainsi référence à l’écoulement du temps et à son irréversibilité. Comme pour faire di au flux d’images qui nous assaillent quotidiennement et polluent notre sensibilité visuelle, la jeune artiste nous impose une décélération, nous pousse à faire une pause devant ses œuvres afin d’en appréhender toute la portée profonde.
Nathalie Becker, novembre 2019
Information de contact pour cet événement
Internet: http://schlassgoart.lu
Organisateur: Ville d'Esch-sur-Alzette
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